Edito

Problématique du développement du sport guinéen : les recommandations de Boubacar 2 Barry, ancien SG adjoint FEGUIFOOT

La problématique du développement du sport en guinée se caractérise par une faible capacité de production de sportifs bien formés, bien encadrés et bien accompagnés, afin de répondre aux exigences de la pratique du sport de haut Niveau. De nos jours, le sport est devenu un outil d’éducation, de promotion de la santé des citoyens et d’insertion socio professionnelle des jeunes. Cependant en guinée, par faute de cadre juridique le sport éprouve d’énormes difficultés à jouer pleinement le rôle qui lui est dévolu. S’appuyant sur des données établies non exhaustives, cela fait plusieurs années que le sport guinéen n’a pas pu produire de sportifs de haut niveau pouvant monnayer leur talent ailleurs de façon efficace, cette faiblesse s’explique par le fait que sur le plan de la formation technique, juridique, organisationnel et institutionnel, il manque de cadre approprié d’orientation stratégique et opérationnelle permettant d’assurer un plein épanouissement des jeunes.

Cette défaillance s’explique en partie et pas des moindres par le manque d’un cadre juridique normatif. Abordant la problématique du développement du sport sous l’angle juridique, il est important de faire ressortir les éléments constitutifs qui définissent ce cadre. Tout d’abord, le cadre juridique par définition détermine l’ensemble de normes établies, combinées aux structures au sein desquelles des personnes sont désignées de manière organisée, soit par voie élective, soit par voie de nomination et qui agissent à travers un mécanisme d’animation administrative ou juridictionnelle pour la mise en application de ces normes au sein de l’entité. Les normes auxquelles ont fait mention sont entre autres : les codes, les lois, les règlements, les décrets, les arrêtés et les décisions produits par des institutions et organes appropriés désignés à cet effet ; tel que : le parlement en parlant du code et de loi, le président de la république en parlant décret et ordonnance, le ministère des sports en parlant d’arrêté et de décisions. Si tous ces documents cités ont un caractère règlementaire donc contraignant à tous, il faut préciser que la loi et le code sont les documents règlementaires les plus accomplis du fait de leur mode d’adoption qui est le parlement (l’assemblée nationale). Toutefois, si la loi est strictement d’ordre juridique, le code quant à lui bien qu’étant une loi opposable à tous reste technique, et regorge en son sein plus d’informations techniques qui cadrent avec la thématique concernée et mobilise plus de documents. En restant dans le contexte guinéen, il faut retenir que la règlementation au sein du sport est quasi inexistante, car le document fondamental au sens de la loi qui sert de base légale à partir de laquelle tous les autres documents devraient puiser leur source de production et servir de référentiel d’animation technique doit être le code du sport, mais malheureusement, ce document précieux n’existe pas encore dans l’écosystème juridique du sport guinéen.

D’ailleurs, C’est ce qui explique en grande partie les difficultés du département des sports à faire face aux multiples conflits qui naissent çà et là au sein des fédérations en particulier et au sein du mouvement sportif guinéen en général sans pour autant détenir la capacité légale ou les instruments légaux permettant de résoudre ces conflits. Du coup, le mécanisme légal qui devrait être la boussole cède la place à la médiation, à la conciliation, au consensus et au compromis en lieu et place de la justice. Il est aussi important de rappeler qu’en république de guinée, tous les départements ministériels sont plus ou moins bien règlementés et possèdent chacun un code de référence dans leur domaine respectif (code minier, code des collectivités, code foncier, code des marches publics, code des investissements, etc….) pour ne citer que ceux-là , même si par endroit le respect et la mise en application de ces textes font défaut. Par contre avec le ministère en charge des sports, il n’existe pas de code de sports cela nous enlève toute possibilité de parler de mauvaise application. Cet état de fait maintient le département des sports dans une impasse totale de faire face à sa responsabilité suite aux différents conflits qui naissent dans le sport de manière particulière.

En observant de près le fonctionnement du sport guinéen, on a tendance à croire que les fédérations sportives dépendent plus des confédérations et associations internationales auxquelles elles sont affiliées et que c’est de ces organisations internationales qu’elles tirent leur source de légalité et de légitimité en lieu et place du ministère des sports qui est l’instance délégataire. Pourtant, de toute évidence, c’est le ministère des sports qui a cédé une portion de son pouvoir aux fédérations par le biais de la délégation de pourvoir du service public en tant qu’outil d’animation. Il faut noter que le document fondamental qui lie les fédérations sportives au ministère des sports, qui doit en principe trouver sa source de production dans le code du sport et qui sert de base d’engagement sur les responsabilités de chaque partie (fédération- ministère), c’est la « convention délégataire ». Personnellement, je ne connais pas l’existence de ce document dans toute sa forme légale au sein de l’environnement règlementaire du sport. Et si ce document existerait, il manque de vulgarisation auprès des animateurs des fédérations sportives qui de facto doivent être bien outillés sur le contenu de ce document. Dans la logique des faits, il ne revient pas à une fédération de définir le cadre normatif, il est de la responsabilité particulière du ministère des sports de produire toutes les normes sportives de manière claire, bien codifiées et bien règlementées, définir le rôle de chaque acteur en fonction du pouvoir qu’il détient, puis assurer le contrôle du respect de l’application des textes.

Ainsi dit, c’est au ministère des sport à travers ses services techniques de travailler pour la production de toute la règlementation applicable aux acteurs, et c’est de sa responsabilité aussi de diffuser cette règlementation à travers ses canaux et ses services déconcentrés. En fin, c’est de la responsabilité du ministre des sports de veiller au respect strict de l’application des normes et règlements édictés. Pour toutes ces raisons, le ministère des sports dans son fonctionnement doit s’assurer au même titre de l’accomplissement des taches en lien avec la production normative que les résultats des équipes nationales. De toute façon, le rôle d’animation du sport reste sous la responsabilité des fédérations sportives, mais celui de l’élaboration des textes juridiques, de la diffusion des règles élaborées et de la veille sur l’application de ces règles incombe exclusivement au ministère en charge des sports. D’où la nécessité pour le ministère de se focaliser beaucoup plus sur le domaine normatif que sur celui du résultat sportif des équipes nationales.

Quant à la justice sportive, un mécanisme de règlement des conflits autres que les outils traditionnels (médiation, conciliation, consensus et compromis) jusque-là en vigueur ont montré toute leur limite, il faut du coup réfléchir à une véritable justice sportive en république de guinée, une justice qui sera installée avec tous les outils nécessaires, qui garantira à tous les acteurs l’équité dans le respect du principe universel de double juridiction. Tout jugement qu’il soit de l’ordre judiciaire, ou par arbitrage reconnait le principe de double degré de juridiction dans le cadre d’une justice équitable. Cest seulement par la justice sportive garantissant tous les droits que le sport guinéen va sortir de cet imbroglio dans lequel il est plongé présentement. C’est pour cela qu’il faille vite organiser le secteur de la justice sportive tout en lui dotant d’un cadre juridique approprie afin de faire face à l’urgence de résolution des conflits en cours dans les fédérations.

De tout ce qui précède, je recommanderai ce qui suit :  Rédiger dans le plus bref délai la « Convention Délégataire » comme base légale qui définira le lien de collaborions entre les fédérations sportives et le ministère des sports,  Améliorer la loi du sport existant par la mise en place d’un « code du sport »,  Mobiliser une équipe d’expert en droit sportif et en législation sportive pour l’élaboration et la validation du « code du sport en guinée »,  Activer le « Tribunal du Sport » conformément aux dispositions de la loi du sport,  Détacher auprès des fédérations un organe de contrôle de gestion pour s’assurer que les règlements élaborés par le ministère des sports sont bien appliqués,  Organiser en collaboration avec les fédérations sportives la « justice sportive » a l’intérieur des fédérations pour mettre fin à la résolution des conflits par consensus ou médiation. le mécanisme consiste à créer les organes juridictionnels de premier et seconde degré avec les différents règlements qui permettent l’application de cette justice au sein des fédérations, Rendre plus opérationnelle la « convention nationale du sport », qui doit servir de creuset de concertation pour la collecte et le recensement des besoins en termes d’amélioration de la règlementation sportive nationale.

BOUBAR 2 BARRY, ANCIEN SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ADJOINT DE LA FEGUIFOOT

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Lamine Touré

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